La scaphandrière, un spectacle d’Olivier Letellier et Daniel Danis, par Natacha Seignolles

Un jeune comédien seul sur scène…

Le spectacle débute. Le décor est composé d’un simple lit dont le sommier en métal jouera tous les décors…

15 minutes et le spectacle est interrompu…la caméra ne fonctionne pas et les images et vidéos ne sont pas le 2eme acteur comme elles devraient l’être…

Car c’est un spectacle habité par un jeune comédien et les nouvelles technologies.

Photos quelquefois comme des polaroïds, quelquefois comme des diapositives, vidéos, éclairages, le monde ainsi créé doit habiller d’une jolie poésie ce spectacle destiné aussi au jeune public…

Au bout d’une dizaine de minutes, le spectacle peut reprendre du moins recommencer à son tout début.

Ce petit trouble de quelques minutes au lieu de générer de la frustration dans la salle a au contraire crée un courant de sympathie et d’empathie pour le jeune comédien qui sera applaudi aussi pour sa prestation d’improvisation.

Mais il pose question. Les technologies sont capricieuses, certainement plus que les comédiens qui jouent le jeu du « Show must go on »…Sans elles, le spectacle aurait-il pu avoir lieu ? elles peuvent donc jouer les « trouble-fête ».

Plus nous sommes habitués à ces nouveaux médias, plus nous sommes exigeants sur la vitesse, la qualité, et plus nous sommes intransigeants sur les pannes. Pourtant plus nous utiliserons ces technologies plus nous devrons gérer ces incidents. Mais là, dans cette salle de spectacle, tout le monde attendait tranquillement que le spectacle reprenne, sans doute parce que nous ne pouvions pas imaginer de devoir quitter la salle…

Dés que le spectacle se rejoue, on comprend parfaitement leur apport :

Des photos en noir et blanc de la sœur adolescente, la mère représentée uniquement par un morceau de son corps, ses mains…

Tout se joue avec cette petite caméra qui permet au comédien de se mettre en scène de manière fragmentée et ainsi de composer avec les autres personnages qui nourrissent le conte (la mère les mains, l’institutrice les yeux…) . C’est une belle histoire d’amour, celle d’un frère qui va sauver sa sœur du lac Loque, avaleur de misère…

Les images et le langage se marient admirablement . Les images ne viennent jamais en surcouche et nourrissent le conte de fulgurances poétiques. Notre imaginaire est doucement irrigué par ces nouveaux médias qui ne servent plus que la poésie

Le metteur en scène et son associé n’en sont pas à leur coup d’essai.

Olivier Letellier est un spécialiste du conte, du théâtre d’objets, entre autres, et Daniel Danis un auteur et metteur en scène canadien reconnu et adepte des nouvelles technologies, formé aux spectacles de Robert Lepage. Ce dernier qui se sert des nouvelles technologies pour inventer de nouvelles écritures scéniques et qui inspire des metteurs en scène remarquables comme Wajdi Mouawad.

Ce spectacle mêle intelligemment la langue vivante du conte et nos imaginaires nourris de nos images, de nos photos de famille.

Magnifique scène que ce jeune adulte qui lance en l’air toutes les photos réalisées par sa sœur et qui s’envolent comme des avions de papier, des papillons blancs…

 A voir au théâtre de Chaillot, Paris jusqu’au 20 octobre 2012